lundi 25 avril 2011

Fumeuse

Elle fume.
Le matin, quand il fait frais, que tout est encore silencieux dans les rues, et que le cliquetis du briquet au fond de sa poche réveille l'envie de fumer.
Avec le café de midi, entourée de collègues et de camarades qui goûtent également le plaisir d'en "griller une", sous le regard désapprobateur des abstinents de passage.
Le soir, sur le balcon, en regardant tomber la lumière qui, devenue rasante, nimbe de rose les sureaux du jardin.
La clope est parfois frénétique, parfois contemplative. Tantôt elle accompagne le mouvement d'humeur, la rage, le chagrin ; la main tremble en l'allumant, la bouche se pince et l'on tire pour aspirer le poison qui détendra, c'est certain - rassurant, bienfaisant poison...
Tantôt elle ponctue le moment d'accalmie, l'esprit se pose en sa compagnie dans une contrée paisible et enroule de claires pensées tout au long du fil de fumée qui monte, tranquille...
Elle fume, et souhaiterait qu'on lui tolère ce plaisir vénéneux qui l'habille et la protège... De quoi ? De la nudité triste d'une journée sans cigarette.
Fumer tue, certes ; mais l'idée même que chaque bouffée la rapproche peut-être de la fin ajoute encore à la jouissance tranquille qu'elle éprouve à se donner, quotidiennement, cette petite mort parfumée.

vendredi 1 avril 2011